Vous vous souvenez de ce jeu avec des pâquerettes, auquel on jouait quand on était petit : je l’aime un peu, beaucoup, etc…Ce jeu résumerait assez bien mon aventure capillaire…

Je crois qu’au fond de moi, j’ai toujours aimé mes cheveux crépus…vraiment. D’ailleurs j’adore y passer ma main et les toucher. Mais je me rends compte que comme je suis née avec, je n’ai pas pris le temps d’apprendre à les connaître, à les comprendre. Je n’avais pas compris que, comme dans une relation de couple, l’amour de ses cheveux (et de soi) doit se construire et se cultiver pour durer. Je les ai sous-estimés et je n’ai pas entretenu l’amour que j’avais pour eux. Jeune et influençable, et ayant grandi dans une société (les XXème et XXIème siècles) qui les dévalorisait, je les ai laissés tomber (au sens figuré…quoique). Je les ai abandonnés puis totalement dénigrés. J’ai voulu les changer pour les façonner à l’image de ce que je pensais être beau.

Résultat : je les ai rendu triste, très triste. On peut même dire que je les ai trompés (oui, oui) en trouvant du plaisir à porter d’autres cheveux (rajouts artificiels ou naturels). Ils se sont laissés dépérir au fur et à mesure que je les ignorais et que je les maltraitais. Jusqu’au jour où, je me suis rendue compte que j’étais moi-même triste, je culpabilisais de les traiter aussi mal, de me traiter aussi mal. Ils me manquaient, la relation que l’on avait avant me manquait. Je ne pouvais être heureuse que s’ils étaient heureux. Alors j’ai voulu me faire pardonner. Je me suis excusée, j’ai pleuré, je les ai écoutés. Et c’est là que tout a (re)commencé entre nous.

J’AIME MES CHEVEUX : BEAUCOUP…

Dans mon article Faut-il bannir l’expression « Il faut souffrir pour être belle », je parle de cette phrase que ma mère me répétait souvent quand j’étais ado : « les cheveux font la beauté de la femme, une femme avec de beaux cheveux est une belle femme». A l’époque, déjà un peu rebelle dans l’âme, je pensais secrètement « ouais, ça c’est encore une doctrine pour qu’on fasse tout pour plaire aux hommes, sinon pour qui doit-on être belle ? ». Et oui, la rébellion n’a malheureusement pas que du bon. Je suis totalement passée à côté du VRAI message de cette phrase qui était « ma chérie, apprend à aimer tes cheveux naturels, si tu t’en occupes bien, ils seront beaux, en bonne santé, et ça se ressentira sur l’image que tu projetteras ».

Le but était de me faire comprendre de m’occuper de moi avant tout, et que le reste suivrait, peu importe ce que le « reste » signifiait pour moi. Etant petite c’est ma mère qui s’occupait de mes cheveux « durs » comme elle disait. Concrètement avoir les cheveux « durs » pour nous ça veut dire avoir les « pires » cheveux au monde : très touffus, très crépus, plein de nœuds, impossible à peigner, impossible à coiffer, bref invivable (qu’on croit). Le mot « dur » fait partie de tous ces termes négatifs que l’on utilise (A TORT !) pour décrire les cheveux à boucles et que les petites filles entendent et intègrent dès leur plus jeune âge. Ces mots sont très dangereux pour l’estime de soi, et la connaissance de ses cheveux.

Ma mère s’occupait de mes cheveux “durs” avec des huiles végétales qu’elle fabriquait elle-même et des tresses au fil. Il s’agit d’une coiffure protectrice consistant à entourer de fil une mèche de cheveux pour étirer les boucles, éviter les nœuds et maintenir l’hydratation des cheveux à l’intérieur de la tresse. A la maternelle et à l’école primaire, je ne me souviens pas de m’être souciée du fait d’aller à l’école avec mes tresses au fil ou de l’apparence de mes cheveux (bon en même temps ma mémoire me fait peut-être défaut). Ils étaient là, faisaient partie de moi et puis c’est tout. J’avais confiance en moi et j’étais plus concentrée sur le fait de jouer et d’apprendre que sur mon apparence ou mes traits physiques. A l’exception des vêtements que je portais, je l’avoue…ce qui est d’ailleurs dur à croire quand on voit mes photos de l’époque (non, je ne les partagerai pas ici).

J’AIME MES CHEVEUX : UN PEU…

C’est au collège que tout a changé. J’ai commencé à être complexée par mes cheveux, je trouvais que mes tresses au fil n’étaient pas du tout esthétiques pour une fille de mon âge. Je voulais être plus jolie. Les hormones n’aidant pas, c’est à cette période que j’ai commencé à comprendre que je ne correspondais pas du tout aux canons de beauté subjectivement définis par la société. J’étais depuis toute petite la seule noire (ou presque) à l’école, et je n’avais personne à qui m’identifier, donc je complexais. On se moquait souvent de mes cheveux (je vous passe les détails), de mon nez, de ma bouche (eh oui, les bouches pulpeuses n’avaient pas autant la côté à l’époque). Heureusement je n’avais pas ma langue dans ma poche : hors de question qu’on se moque de mes cheveux sans se prendre une bonne répartie (verbale) dans les dents !!! Je montrais ma fierté à l’extérieure alors qu’à l’intérieur j’étais très affectée par ses moqueries.

Du coup, je me faisais tresser les cheveux avec des rajouts, donc en apparence j’avais les cheveux longs et lisses (enfin, plus ou moins). Une chose est sûre, il était hors de question que je défrise mes cheveux, ma mère m’avait bien mise en garde « attention, les produits défrisants ne sont pas bons, ils fragilisent et abîment les cheveux, et de toute façon tu es trop jeune, tu verras ça plus tard…au pire tu n’as qu’à les couper si tu ne veux pas t’en occuper! ». Oui, ma mère est une personne très pragmatique, son slogan c’est « Vos cheveux vous tracassent ? Coupez-les ! »

Le problème (mais ça n’en était pas un pour moi à l’époque) c’est que je les tressais tout le temps. Je ne les laissais presque jamais respirer. Je m’assurais simplement qu’esthétiquement ils me plaisaient et plaisaient aux autres. Alors tant pis si mes cheveux étouffaient, entourés de matières synthétiques (les rajouts) pendant des mois, et qu’ils n’avaient jamais le temps de dire ouf. Aussitôt défaites, et hop, je refaisais de nouvelles tresses ! Et je me sentais de nouveaux comme la reine de la soirée, libérée de toute contrainte capillaire pour les prochains mois.

Le problème (pour moi à l’époque) s’est posé quand j’ai commencé à bouger en France pour mes stages et le boulot. Là j’ai commencé à me dire « bon, ça va devenir de plus en plus compliqué de trouver une bonne coiffeuse partout où j’irai. Faudrait peut-être penser à une solution plus simple (que je croyais), moins dépendante (que je pensais), qui laissera plus respirer mes cheveux (erreur !). Et là vous me voyez venir…et si, j’ai succombé, j’ai mis le doigt, la main, le bras dans cet engrenage destructeur : le défrisage chimique.

J’AIME MES CHEVEUX : PAS DU TOUT…

Pourtant ma mère m’avait prévenu depuis longtemps sur les dangers du défrisage. Mais vers 24 ans on ne comprend pas toujours les conseils des autres, on veut faire ses propres expériences. Je me sentais suffisamment adulte pour passer au défrisage, après tout j’avais tenu longtemps avant de défriser mes cheveux, donc je les avais bien préservés jusque-là, non ? Quelle erreur…

Pour celles qui ne sont pas familières avec le défrisage, pour faire simple il s’agit d’utiliser des produits chimiques (contenant en plus des ingrédients mauvais pour la santé) pour modifier la structure chimique et physique des fibres capillaires des cheveux à boucles et ainsi les rendre lisses. Ces produits sont dangereux (corrosifs et agressifs), à manipuler avec une grande précaution (et des gants donc) et à ne pas laisser poser trop longtemps au risque de se brûler gravement le cuir chevelu (je vous passe les conséquences).

Mes années de tresses en continu avaient sacrément abîmé mes cheveux. Et là-dessus je les ai défrisés pendant 6 ans. Pendant longtemps ça m’a semblé être la solution parfaite, c’était simple et ma coiffeuse faisait des miracles. Et puis au fur et à mesure j’ai vu mes cheveux devenir vraiment fins et cassants. Plus ça allait et plus ma coiffeuse semblait dépitée et ne plus savoir quoi faire de mes cheveux. A la fin j’avais même honte d’aller au salon de coiffure, et j’avais peur du jugement de ma coiffeuse et des autres clientes vu l’état de mes cheveux.

L’arrivée de mes 30 ans m’a « sauvée », littéralement. Je ne sais pas pourquoi, sûrement le passage à une nouvelle décennie, un besoin de changement, et le fait de mieux se connaître à la sortie de la vingtaine. J’ai senti que je devais me retrouver, m’assumer entièrement et donc reprendre soin de mes cheveux, ce qui voulait d’abord dire arrêter les défrisages. La cata ! Comment j’allais faire ? Je n’allais plus ressembler à rien avec mes racines crépues bien gonflées et mes longueurs défrisées qui ne ressemblaient à rien.

J’ai fait des recherches sur le net, la meilleure option était de tout couper (ce que l’on appelle faire un big chop) pour laisser mes cheveux repousser naturellement. Double cata pour moi, je ne me voyais pas du tout avec les cheveux rasés ! Et là j’ai pleuré, beaucoup. Je ne savais pas comment j’allais affronter le regard des autres, j’étais terrifiée et abattue. Mais il fallait que je le fasse. J’ai pris rendez-vous au salon de coiffure, et comme je n’étais clairement pas prête à tout couper, j’ai opté pour une transition longue mais en douceur, en coupant mes cheveux au fur et à mesure. Ouf !

Me voilà avec les cheveux plus courts mais d’une longueur acceptable pour moi. J’avais l’impression de m’être plutôt bien sortie de cette épreuve, et je me sentais fière d’avoir sauté le pas. Mais arrêter le défrisage n’était pas l’unique solution à mes problèmes capillaires. Je manipulais mal mes cheveux, je ne les hydratais pas assez, ils étaient très secs, très cassants, très cassés, très fins, bref à l’agonie. Au bout de 4 ans, j’ai réalisé que je n’avais pas les bons gestes, pas la bonne routine, pas les bons rituels. Il fallait que j’apprenne à les écouter, à comprendre leurs besoins.

J’AIME MES CHEVEUX : PASSIONNÉMENT…

C’est là que tout a (re)commencé entre mes cheveux et moi. Je les ai écoutés et grosso modo ils m’ont dit (je vous passe les insultes et les reproches) « c’est bien t’as l’air de te rendre compte de la situation, maintenant arrête de nous martyriser physiquement, utilise des produits plus sains et par pitié on a besoin d’hy-dra-ta-tion !!! ». Bref, je me suis fait passer un savon.

Côté utilisation de produits plus sains, ça collait tout à fait avec ma décision d’opérer une transition drastique pour moi : remplacer petit à petit mes 1001 produits cosmétiques (pas seulement capillaires) par moins de produits, plus simples, de meilleure qualité, beaucoup plus naturels et avec une démarche plus éco-responsable. Et comme j’avais été biberonnée aux huiles végétales de maman, c’était un peu comme un retour aux sources.

Pour l’hydratation, j’avais rencontré le même problème il y a quelques années pour ma peau. En discutant avec une conseillère d’un magasin, elle m’expliquait que je nourrissais ma peau mais que je ne l’hydratais pas assez…et je n’avais même pas pensé à faire le parallèle avec mes cheveux ! Bref, je découvre donc que même si j’utilise des huiles végétales, mes cheveux ont d’abord besoin d’eau. Mais je reviendrai sur la différence hydratation/nutrition dans un prochain article. Et puis est-ce que les huiles que j’utilisais étaient les plus adaptées à mes cheveux ? Pas sûr…

Côté manipulation, j’utilisais un peigne à dents larges, donc je pensais « eheh, j’ai le bon instrument, j’assure ! » mais je les peignais TOUS LES JOURS (erreur !), et à sec (non, sérieux ?!). Et le pire c’est que j’étais contente quand j’entendais le fameux « clac », le bruit des nœuds qui se cassent quand on se peigne vigoureusement les cheveux. Un bruit caractéristique que j’entends depuis toute petite et qui me faisait penser « j’ai défait un nœud, yeah !» alors qu’en fait il veut dire « t’as cassé pleins de cheveux ma chérie, donc fibres capillaires abîmées et encore plus de nœuds en perspective ! »

Depuis que j’ai creusé ces sujets là et changé mes habitudes, ça va tellement mieux entre nous. Perso j’adore mes cheveux tels qu’ils sont (c’est-à-dire pas parfaits), je me sens libre et libérée (délivrééée !), quoique…J’ai l’impression d’être tombée dans un autre piège de l’amour : ils m’obsèdent, je leur consacre beaucoup de temps, trop de temps. En général les conseils sur les soins des cheveux à boucles se résument à « Vous ne savez pas quoi faire de vos dimanches ? Pourquoi ne pas passer 6h dans votre salle de bain à utiliser 10 produits ? Vos cheveux vous le rendront bien ! ».

A ce stade ce n’est plus de l’amour, c’est de l’addiction. Est-ce la seule issue ? Je ne crois pas. Alors la prochaine étape pour moi : aimer mes cheveux à la folie, c’est-à-dire de façon naturelle, saine, simple, décontractée, sans contrainte et sans prise de tête. Bref, que ça coule de source ! Utiliser 3kg de produits capillaires et passer 8h toutes les semaines à m’occuper de mes cheveux n’est plus possible. Alors comment faire pour n’utiliser que des produits sains vraiment utiles, avec un rituel de soin simple et intégrée à son rythme de vie ? Je ne sais pas encore, mais on y travaille.

Et vous, quelle est votre histoire de couple avec vos cheveux ? Où en êtes-vous sur l’échelle du « je les aime… » ? Rejoignez le groupe Facebook Mes Boucles Légères et racontez-nous votre histoire capillaire, en toute bienveillance bien sûr !

A très vite !

Capillairement & légèrement vôtre,

Christie